L’innovation pour l’accès à l’éducation

Il est frappant de constater à quel point le droit fondamental d’accès à l’éducation pour tous est une question qui se pose dans des termes très similaires dans de nombreux pays. Energie et capacité des gouvernements à combattre cette inégalité sont elles-mêmes bien inégales… Comme souvent, dans un monde d’une grande complexité, aux mutations de plus en plus rapides, les meilleures solutions pourraient ne pas venir d’en haut, mais d’initiatives plus locales, agiles et aux promoteurs les plus déterminés.

Une étude récente réalisée pour l’association « L’Ecole des Découvertes » des méthodes pédagogiques innovantes pour des jeunes se retrouvant hors des circuits classiques, a ainsi montré la richesse et la diversité des travaux et des expérimentations dans ce domaine. Les pistes les plus explorées s’articulent autour de la capacité à donner confiance, promouvoir l’autonomie, valoriser les compétences. L’importance grandissante et de plus en plus reconnue des « soft skills », du savoir-être, en complément du savoir-faire, amène à développer l’auto-apprentissage : on expérimente plutôt qu’on écoute, on se projette dans le futur et on favorise une simulation et une immersion progressive dans la société. On travaille plus naturellement en jouant (« serious game »), et en coopérant. Le lieu dans lequel ces apprentissages sont mis en œuvre est également très important car il permet d’ancrer une démarche pour des publics en manque de repères et de stabilité.
En ce qui concerne l’autonomie, l’étude fait la part belle aux MOOC (Massive Online Open Course – Cours gratuits en ligne) qui permettent d’apprendre à son rythme et d’approfondir certains sujets. Elle met aussi en avant les expériences réussies de classes inversées et d’autodidaxie où des jeunes apprennent à d’autres jeunes. Elle insiste sur la libre fréquentation de l’enseignement qui ne doit pas être vécu comme une contrainte mais qui, de par sa forme, entraîne une meilleure assiduité.
La valorisation des savoirs et compétences et leur concrétisation passent par des projets de difficulté progressive, des projets en groupe, la création de son propre MOOC ou groupe Facebook, la fabrication d’un objet, l’obtention de certifications ou la participation à des concours culturels comme sanction sociale positive, sans oublier des périodes en alternance.

Les expérimentations, souvent à petite échelle, de toutes ces pratiques pour des jeunes en difficulté existent au sein d’écoles, de projets, et ont un véritable impact. C’est ce type d’organisations, avec leur esprit innovant, leur recherche d’améliorations, leur capacité à se renouveler, au service de ces enfants défavorisés, qu’Amanjaya, grâce à vous, a à cœur de soutenir.

Quelle éducation ?

C’est une évidence, l’accès à l’éducation est un bien précieux. Mais quelle éducation ? Il semble légitime de nous interroger et d’orienter nos efforts en vue de faire porter le plus de fruits aux moyens qui nous sont confiés.
Un dictionnaire définit l’éducation comme l’art de former l’être humain, d’assurer son épanouissement physique et mental. Ambitieux programme !

Cette définition suggère de distinguer les termes «  »formation » » et «  »éducation » », auxquels on peut même trouver des objectifs apparemment antagonistes. Former, c’est donner une forme. Cela évoque le moule, la sculpture, d’où la pâte humaine ressort avec les qualités précises recherchées par le formateur: des savoirs, des compétences… On sait combien une telle préparation est nécessaire pour s’adapter à des règles sociales, et y endosser un rôle dont les limites et les attentes ont été définis par des siècles de culture. Cependant, l’adaptation à la société peut-elle être considérée comme l’unique finalité de l’homme? Certainement pas. Si l’on croit légitime l’aspiration de chacun au bonheur, il est probable que sa réalisation nécessite un environnement favorable et porteur. Et c’est pour cela qu’à côté, et au-delà de celui de formation, nous aimons tant le mot «  »éducation » ». La déclaration universelle des droits de l’homme évoque le droit de chacun à «  »prendre part librement à la vie culturelle de la communauté, jouir des arts et de participer au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent » ».

Autrement dit, à assurer son épanouissement physique et mental, objectif légitime de l’éducation comprise dans toute la plénitude et la noblesse du mot. A l’inverse de la formation qui uniformise, l’éducation est ce qui permet à chacun de s’épanouir dans toute la richesse de sa différence, richesse individuelle qui est l’essence de notre richesse collective, différence qui seule pourra fonder la contribution de l’individu à l’évolution de la société. Et la société d’aujourd’hui n’est elle pas plus que jamais en attente impérative de transformations ?

A la Fondation Amanjaya, nous croyons au sens et à la valeur de l’homme, et à la nécessité de son épanouissement pour chacun comme pour la collectivité. C’est pourquoi nous aimons tant le mot éducation. C’est pourquoi nous aimons soutenir des associations et des projets qui s’attachent, eux aussi, à développer la part humaine de l’homme. Cette nouvelle lettre vous présente deux associations soutenues par la Fondation Amanjaya et qui ont en commun de croire à l’importance de l’éducation et d’œuvrer chaque jour afin de redonner un cadre de vie meilleur et un environnement épanouissant à des enfants défavorisés et vulnérables : Share a Child Movement, aux Philippines et Our Home, au Cambodge.

Retour de voyage en Asie

C’est une petite ville sur les hauts plateaux montagneux du centre du Vietnam. Kontum et sa région sont à peine signalées dans les guides touristiques, les bombardements des B52 en 1972 sont passés par là. Aujourd’hui la région abrite plusieurs minorités ethniques du pays, et une communauté catholique y est installée autour de l’église en bois. Françoise et Monique, enseignante et travailleuse sociale en retraite, viennent ici six mois par an. Elles se consacrent depuis des années aux nombreux petits orphelins recueillis par l’association Poussières de vie, dirigée localement par le Père Huu, et leur enseignent les bases de la vie en société.

Nina, jeune femme Philippine de très bonne famille, aux études brillantes, a tout quitté en 1988 pour fonder une organisation humanitaire sur l’ile de Cebu. Share a child s’occupe des enfants très jeunes des bidonvilles ou des montagnes reculées, leur donne des cours d’éveil scolaire, pour que le fossé ne se creuse pas avec les autres enfants, et pour leur permettre d’acquérir le bon niveau pour entrer ensuite en classe élémentaire. PSE – Pour un Sourire d’Enfant- a été fondé il y a quinze ans par Christian et Marie-France. Cadre chez IBM, Christian
découvre, à la suite d’un périple familial en camping car, l’extrême détresse des petits chiffonniers qui vivent littéralement sur la gigantesque décharge à ordures de Phnom-Penh. Il n’en repartira pas. PSE prend en charge tous ces enfants de la décharge, les scolarise, leur donne
accès à des formations professionnelles, pour leur ouvrir un futur plus digne. C’est aujourd’hui plus de 6000 enfants ainsi guidés dans la vie. PSE vous est présenté dans cette lettre. Toutes ces initiatives désintéressées, redécouvertes lors d’un récent voyage en Asie du sud-est, ne font pas seulement chaud au coeur. Elles prouvent à quel point l’engagement solidaire d’individus peut générer des résultats formidables. Passer son savoir-faire, transmettre ses connaissances, son expérience, même si elles sont minces, à ceux qui n’ont rien, ouvre le monde et le futur à ces enfants et ces jeunes. Nous qui attendons souvent trop de l’Etat qui protège et redistribue, nous devrions prendre exemple sur ces hommes et femmes libres qui ont pris les devants, n’ont pas voulu rester spectateurs et sont devenus acteurs de la vraie solidarité. Ce supplément d’humanité, d’accompagnement pour aider les plus démunis, fait clairement la différence. Il décuple l’impact de ces petits projets, car il transmet aussi l’envie de les dupliquer. Que ces belles leçons d’engagement ne restent pas isolées, qu’elles nous incitent tous à sortir de notre zone de confort pour contribuer nous mêmes, chacun à notre échelle, à un monde plus équitable, où les richesses et l’espoir sont mieux partagés.